Situé à deux pas du port de La Rochelle, le marais de Tasdon est aujourd'hui un lieu incontournable pour qui veut rentrer en contact direct avec la nature.
Cet espace naturel peut se pratiquer tout au long de l’année, et ça c’est rudement sympa. Au fil des mois et des saisons, le marais de Tasdon se dévoile et s’exprime. Couleurs, odeurs, faune et flore, … cette grande coulée verte rochelaise est en mouvance perpétuelle !
Aujourd’hui, avec cette balade, j’aimerai vous emmener avec moi à la découverte de cet écosystème préservé indispensable pour le développement de l’Agglomération de La Rochelle.
Mais, vous allez également le voir, il s’agit d’un territoire offrant une belle expérience de visite.
Parce que le patrimoine local ne se définit pas uniquement aux Tours St Nicolas, de la Chaîne et la Lanterne ou aux hôtels particuliers, le marais de Tasdon recèle d’une formidable Histoire et d’une pluralité de vestiges retraçant son passé.
Laissez-vous guider et surprendre …
Le Marais de Tasdon : 700 ans d'Histoire et des siècles d'antropisation au service des Rochelais !
Un marais salant et un canal commercial primordial à La Rochelle
Les alentours de La Rochelle ont longtemps été inhospitaliers. En dehors des remparts (qu’ils soient médiévaux ou plus modernes), le territoire rochelais était partagé entre un ensemble d’espaces cultivables (vignes ou petits champs) et des marais herbeux ou salants. En bref, au début, dans le petit village de Tasdon : il n’y avait RIEN !
Ce n’est qu’au XIVème siècle que ces marais évoluent. Durant le Moyen-Âge, il vont jouer un rôle stratégique très important. L’aventure débute en 1325 avec le creusement d’un premier chenal. Il s’agit de l’actuel chenal de la Moulinette. Il faut dire que la présence de ces terres en friche représente une certaine aubaine pour La Rochelle. La récolte de sel ayant commencée quelques décennies plus tôt, cet or blanc doit absolument être vendu en Charentes, en France et à l’international.
Cette culture du sel est le pilier central du développement du marais de Tasdon. Cette activité fait vivre de nombreuses familles de sauniers jusqu’aux années 1920’s.
Quelques années plus tard, au XXème siècle, le chemin de fer déboule en Charente-Maritime. Le commerce fluvial perd de la vitesse ! Pour ne pas tomber en désuétude, à partir des années 1920’s, l’activité du marais de Tasdon change petit à petit. Les bassins de sel sont asséchés et laissent progressivement place à de larges espaces de pâture pour des bovins (notamment des vaches laitières).
Les années 1960/70 : Un marais et des projets ...
Durant les Trente Glorieuses, les transformations continuent pour le marais de Tasdon. Ces chantiers commencent en 1962 avec la condamnation de l’accès à la mer. Le chenal de la Moulinette est comblé. Quelques temps plus tard, dans le courant des années 1970’s, le quartier de Villeneuve les Sallines sort de terre. En 1975, de nouveau aménagements sont entrepris avec la création des deux lacs artificiels que l’ont peut toujours voir aujourd’hui.
La création du nouveau marais continue jusqu’au tournant du millénaire. Nous pouvons par exemple citer l’année 1996 qui voit émerger un grand programme de sauvegarde d’oiseaux migrateurs et de nouveaux équipements hydrauliques. Cet arsenal fluvial est complété par la création de 3 îlots artificiels d’une superficie de 2 hectares pour aider notamment à l’accueil de la faune sauvage locale et des oiseaux migrateurs.
Mais le marais de Tasdon devient vraiment l’objet de préoccupation de la municipalité et de l’agglomération de La Rochelle en 2005. Deux projets sont alors imaginés pour pouvoir écrire la future histoire de cet espace naturel.
- Le 1er est appelé « Cité Lacruste« . Ici, l’objectif est de réaliser un Éco-Quartier au sud de la Gare pour faire un lien avec Villeneuve les Sallines. La Cité Lacruste devait être à l’emplacement actuel du marais sec (côté gare). Pour se faire, un ensemble de bâtiments résidentiels, une réfection des axes routiers (avec création de l’actuelle avenue Simone Weil) pour désenclaver l’axe « Minimes-Centre Ville » et Villeneuve les Sallines.
- Le second projet était tout simplement une restructurait des espaces naturels et la création d’espaces de balades. En clair, le marais de Tasdon, est repensé ici comme un vrai lieu de vie, de rencontre et d’évasion.
C’est ce second projet qui est retenue par l’agglomération dans le cadre du projet « Territoire Zéro Carbonne » inititié par la ville depuis quelques années maintenant. Les travaux courent de 2019 à 2021.
Le marais de Tasdon : un espace naturel exceptionnel et une faune fantastique aux portes de La Rochelle ...
Ainsi, en 2021, c’est un ensemble de 82 hectares qui ont été re-naturalisés. Remembrement des bassins, déblais des remblais laissés en friche après la construction de Villeneuve les Sallines ou encore création d’îlots et de chemins pédestres, … Le projet est incroyable : il s’agit tout simplement d’un des plus grands projets de préservation du patrimoine naturel en France cette année-là !
C’est tout cela que j’aimerai vous montrer dès maintenant. Embarquons dans une douce visite du marais de Tasdon.
Un parcours de visite au fil de l'eau
Pour arriver dans la marais, je vous recommande de vous stationner rue des Peupliers (300m de distance environ). Une trentaine de places vous attendent. Cependant, les équipements pour stationner son vélo sont assez conséquents : ainsi, je vous conseille vivement de venir sur place à deux roues et de laisser la voiture au garage !
La visite se fait en une demi-journée. C’est l’idéal pour passer un moment au frais en cas de forte chaleur pour pour s’évader quelques instant du tumulte de la foule du Vieux-Port.
Vous pouvez débuter votre visite par plusieurs entrées situées à chaque extrémité du site : 2 sont situées côté Tasdon (rue des Peupliers et au rond point de l’avenue S.Weil) ; 2 entrées au niveau du rond point de l’avenue Jean-Moulin ; 1 entrée au Relai de la Moulinette ; 1 entrée avenue Robespierre ; 1 entrée à la Maison de la Santé de Villeneuve les Sallines ; 1 entrée au coeur de ce même quartier et 1 entrée côté rocade (N137).
En me promenant au fil des allées piétonnes (voir schéma ci-dessus), j’ai pu déambuler entre les canaux, les chenaux et les lacs artificiels. Car oui, au marais de Tasdon, le promeneur est en contact direct et perpétuel avec cet élément essentiel à la vie sur terre qu’est l’eau. Avec 2 lacs artificiels offrant des panoramas très jolis sur la gare de La Rochelle pour l’un et les tours du quartier de Villeneuve les Sallines. Des bancs sont présents tout autour, idéal pour se poser pour dessiner, observer ou lire au doux son du clapotis de l’eau.
Cette omniprésence de l’eau le long des 10km de sentiers pédestres qui ont été aménages, fait émerger une ambiance hors du temps. Quelques fois, je me suis surpris à penser me retrouver en Camargue, en Asie ou dans des marais dans l’île de Ré. Ce marais est totalement dépaysant pour qui souhaite prendre son temps
Le marais de Tasdon : des animaux, des végétaux et des Hommes
Mais cet espace, en dehors d’être une vraie bulle végétale, est aussi une fabuleuse réserve pour la faune et la flore locale. En bref, le marais de Tasdon « made in 2023 », c’est 1200 arbres et 63 000 plantes présentes sur place et qui sont préservées !
Cette pluralité organique permet de passer de paysages en paysages en un clin d’oeil. Pour ma part, j’ai commencé mon expédition par un espace marécageux, puis je suis tombé sur un petit bois aux abords du Relai de la Moulinette. Ma balade s’est achevée en face du quartier de Villeneuve les Sallines devant les restes du chenal de la Moulinette.
Au total, j’ai donc pu relever 3 types de paysages présents au sein du marais. Ce qui est très agréable.
Mais que serait un marais sans sans faune ? Le marais de Tasdon est le lieu d’habitat de 150 espèces d’oiseaux (migrateurs ou non), 13 espèces de chauve-souris, 8 espèces de batraciens (rainettes, grenouilles, …), 15 espèces de poissons sans compter la palettes très complètes de libellules et autres insectes. une sacré ménagerie n’est-ce pas ?
D’ailleurs, ma rencontre la plus surprenante a eue lieue en début de balade avec une charmante abeille. Je suis resté 15min à l’observer et j’ai même pu la prendre en photo. De même, au détours d’un plan d’eau, j’ai pu observer des échassiers comme un héron en plein vol et une belle panoplie d’oiseaux.
Finalement, comme vous pourrez le voir ci-dessous, la visite de marais de Tasdon doit également s’envisager comme une déambulation dans un parc animalier. Il est donc primordial de respecter les espèces, les lieux et rester sur les sentiers balisés pour ne pas déranger les habitants du marais !
Autre chose est remarquable pour les amoureux des animaux et les spécialistes des oiseaux migrateurs. À la jonction entre les deux marais, il y a la présence d’une tour d’observation ! Niché à une vingtaine de mètres du sol, accéder à la plateforme d’observation constitue une belle pause agréable avant de poursuivre la découverte … notamment vers les éléments du patrimoine encore présents sur le parcours de visite.
Le marais de Tasdon pour les PMR
À mon sens, le marais de Tasdon est globalement accessible pour les visiteurs en situation de handicap (les lieux sont calmes, ce qui peut être agréable pour les personnes souffrantes de troubles autistiques). Néanmoins, ce n’est pas la même histoire pour les publics dits « empêchés physiquement ». Le principal danger pour les personnes en fauteuils – ou avec des canes – est l’avenue Jean Moulin qui scinde les deux espaces du marais en deux parties. Autre chose, même si le marais est généralement plat (malgré quelques différences de niveaux sur les passerelles en bois). Enfin, une chose m’a agréablement surprise : les espaces entre les barrières d’entrées sont modulables et les espaces entre les elles permettraient de laisser passer un fauteuil sans effort. Voici quelques photos de situation :
Le patrimoine et les histoires oubliée du Marais de Tasdon - Éléments de la mémoire locale de La Rochelle
Nous venons de le voir, le marais de Tasdon c’est une formidable réserve naturelle aux portes de La Rochelle. Tout au long de l’année, vous pouvez y découvrir à la fois de multiples variétés de végétaux et d’animaux.
Le petit patrimoine rural méconnu
Mais, se balader dans le marais de Tasdon, c’est aussi partir à la rencontre d’un panel d’éléments patrimoniaux très intéressants. Ils retracent la vie qui s’est égrainée au fil des siècles et des décennies. Car oui, cette espace n’est pas qu’un condensé entre faune et flore …
Tout d’abord, quelque chose a retenu mon attention durant mon parcours de visite. Au gré de ma pérégrination, j’ai vu et traversé quelques petits ponts de pierre. Ils dénotent totalement avec le reste des équipements. En effet, ces petits ponts sont en pierre calcaire, ils datent probablement du milieu ou de la fin du XIXème siècle. Ils servaient peut être à baliser des chemins entre les marais lorsque ce dernier accueillait une activité salicole florissante. Au total, j’en ai dénombré 3 : un dans le marais sec et deux dans le marais mouillé.
Mais déambuler dans les allées du marais m’a aussi permis de découvrir un second élément du patrimoine qui m’a permis de retracer les bribes de son histoire (et plus globalement de l’histoire rurale de La Rochelle). À côté du Relai de la Moulinette – centre culturel dédié à la découverte de la faune locale) – je suis tombé nez à nez avec un véritable trésor architectural.
Des murs décharnés, une végétation luxuriante ayant repris ses droits sur l’anthropisation de l’Homme (son action sur cet espace naturel) et un vieux portail semblant mener tout droit à une autre dimension … Tel est le décor que j’ai pu découvrir en face de l’actuel centre-équestre.
À mon sens, d’après les graffitis encore présents sur les murs (dates, calculs, noms, …) , il s’agirait des ruines d’une ancienne ferme. Ces murs pourraient être les vestiges d’une vieille grange pour le bétail ou un entrepôt de stockage de fourrage ou pour les pins de sel ? La présence de ces vieux bâtiments pouvant dater du XVIIIème ou XIXème siècles attestent de la présence d’une activité agricole et économique il y a 200 ans !
Deux anecdotes inédites du Marais de Tasdon
Un noyé dans un fossé ...
Le marais de Tasdon, c’est comme l’océan Atlantique : si on n’y fait pas gaffe, on risque d’y laisser sa peau ! Preuve en est avec cette première histoire qui s’est déroulée le 15 février 1917. Nous sommes en plein Conflit mondial. En ce mardi soir d’hiver, Mr Jacques-François Pinturault, âgé de 65 ans et horticulteur de son état (il cultivait des plantes d’ornement), rejoignant sa demeure à Tasdon. Mais voilà, il avait bu un petit coup de trop … En traversant l’un des ponts présents dans le marais de Tasdon en voulant prendre un raccourci, il chut dans l’eau salée.
C’est le journal « Le Courrier de La Rochelle » qui nous raconte les faits. Étant un peu aviné et n’étant pas éclairé, le malheureux tombe comme un poids mort dans la vase et s’enlise de tout son long.
Son cadavre est découvert et repêché quelques jours plus tard, le jeudi matin, après l’alerte d’un saunier qui prenait la route de son bassin salicole.
Agressions aux abords du Marais de Tasdon !
Dans le marais de Tasdon, il n’y a pas eu que des histoires de noyades (j’en ai retrouvé plusieurs dans la presse de l’époque !). Nous l’avons dit ci-dessus, il s’agit d’un espace naturel qui était à demi en friche au début du XXème siècle.
Pour cette seconde anecdote, direction le 30 décembre 1904. D’après le quotidien « L’Écho de Jarnac« , en cette avant-veille du Nouvel-An 1905, trois personnages revenaient de la Gare de La Rochelle. Ce petit groupe était composé de Mr et Mme Locqueteau, habitant La Rochelle et de Mr Pelletier – beau-père de Mr Locqueteau. Ce dernier était contrôleur aux Chemins de Fer français. Il résidait à Tasdon. Nos trois protagonistes allaient dîner chez ce fameux beau-père. En arrivant dans la rue de Mr Pelletier, le groupe a été pris à partie par un individu menaçant. Sans que l’on puisse comprendre pourquoi (peut être une agression sexuelle en direction de Mme Locqueteau ?), un cri perçant et déchirant de Mme Locqueteau alerte tout le voisinage !
Les badauds se précipitent pour voir ce qu’il se passe et découvrent Mr Pelletier et Mr Locqueteau gisants dans une mare de sang. En l’occurrence, ce dernier avait reçu deux coups de couteau : l’un lui a traversé le dos et un second lui a tranché le nez, la bouche et la joue droite. En clair, il était défiguré. Mr Pelletier aurait été assommé !
En dehors de ces deux premières victimes, un mystère demeure : où est donc passée Mme Locqueteau ? De toute évidence, elle s’est enfuie durant la bagarre des trois hommes. Après quelques recherches de la gendarmerie, on la retrouve enfin saine et sauve au petit matin dans l’un des buissons du marais de Tasdon. Elle racontera avoir été poursuivi à l’aveuglette par un complice de l’agresseur qui attendait plus loin. Avançant dans le noir, avec un agresseur à ses trousses, elle s’était réfugié dans l’ancienne grange de la ferme de la Moulinette. Les agresseurs n’ont jamais été retrouvés !
Vous l’aurez compris à travers cette balade, le marais de Tasdon est LA sortie nature à faire à La Rochelle si vous cherchez à vous éloigner du tumulte des plages (surtout en ce début de saison qui arrive doucement).
Faune exceptionnelle, flore très riche et équipements : ici, tout a été très bien pensés pour vivre une expérience optimale dans cet espace préservé.
Une expérience à la fois sensorielle (avec de nombreuses odeurs et un magnifique panel paysager !) et mémorielle.
Car oui, après tout, ce marais a été à tour de rôle un lieu commercial stratégique, un espace agricole indéniable qui a participé au développement locale de Tasdon et de l’agglomération rochelaise. C’est cette histoire qui rejaillit quelques fois aux détours d’un chemin.